Aspects légaux et fiscaux
L’objet du présent article est de détailler les aspects légaux et fiscaux les plus significatifs dans le cadre de l’acquisition de biens immeubles résidentiels en Espagne, et en particulier en Catalogne, par des étrangers non-résidents.
- Aspects légaux à tenir en compte
La législation espagnole en matière d’acquisition de biens immeubles résidentiels n’est pas facile pour un étranger, pas même pour un Espagnol ou un étranger résident. Elle est en effet composée d’une multitude de règles, qui changent constamment. En plus des réglementations étatiques, il faut tenir compte de celle des Communautés Autonomes : pratiquement toutes ont édicté leur propre réglementation en la matière, qui a un impact direct sur les contrats d’achat. En ce sens, nous avons le Code civil de Catalogne, la Compilation forale de Navarre, le Code foral d’Aragon, la loi sur le logement aux îles Canaries ou la loi sur le logement aux îles Baléares, pour ne citer que quelques exemples.
Ainsi, nous détaillons brièvement à continuation à titre indicatif les principales étapes à suivre dans la plupart des cas concernant l’acquisition d’une propriété résidentielle en Catalogne.
- Offre d’achat
Une fois nous avons localisé le bien que nous souhaitons acquérir, que ce soit par l’intermédiaire d’une agence immobilière ou directement auprès d’un particulier, il est usuel de faire une offre d’achat dans laquelle nous préciserons le prix et les conditions d’achat. Dans ce cas, une somme d’argent est généralement remise à titre d’acompte. Les agences immobilières ont normalement un modèle de document à ces effets (qu’elles appellent « reserva » ou « señal »), et il établit les conditions de l’offre concernant le bien que nous souhaitons acquérir. Nous ne nous attarderons pas sur les modèles utilisés par les agences immobilières à ces effets, mais nous recommandons à l’intéressé de les lire attentivement, d’exprimer ses doutes et d’exiger, le cas échéant, que la rédaction du document soit modifiée pour l’adapter à ses besoins, en ayant recours à un avocat spécialisé si nécessaire. Il est important de préciser qu’en cas de non acceptation de l’offre par le propriétaire, l’agence immobilière devra rembourser l’intéressé immédiatement, et que l’acquisition sera sujette à l’analyse satisfaisante de la situation juridique du bien, entre autres conditions possibles (i.e. obtention de financement).
- Due diligence
Une fois l’offre acceptée par le propriétaire, le cas échéant, l’étape suivante serait l’analyse du bien immobilier, ou due diligence, qui devrait impliquer une évaluation complète du bien, du moins sous les perspectives juridique, constructive et urbanistique. Il est très fréquent que les acheteurs potentiels, notamment les particuliers, ne réalisent pas cette analyse importante, principalement par méconnaissance des risques ou par confiance dans les agences immobilières. Nous tenons à souligner l’importante de cette étape pour éviter d’éventuels futurs problèmes car en Espagne le notaire qui officialise l’acte de vente ne réalise pas une révision exhaustive de la situation du bien (elle est plus limitée à des aspects formels, et sa portée est beaucoup plus limitée que celle des Notaires en France, à titre d’exemple). Aussi, il convient de noter que plusieurs agences immobilières incluent dans leurs contrats d’intermédiation une clause indiquant que leurs services n’incluent pas le conseil juridique ou urbanistique. Pour tout ce qui précède, il est hautement conseillé de compter avec l’aide d’un avocat spécialisé pour nous assurer que le bien ne présente pas de problématiques sous-jacentes.
3.Arrhes
Dans le cas où le résultat de l’analyse soit favorable, l’étape suivante sera normalement la signature d’un pacte d’arrhes, qui implique le versement par l’acheteur au vendeur d’une somme d’argent pour contribuer à l’immobilisation du bien avant l’exécution de la vente. Notre système juridique distingue différents types d’arrhes : (a) les arrhes pénitentielles (« arras penitenciales »), qui permettent à chaque partir de se libérer unilatéralement de la future opération de vente (l’acheteur perdrait dans cette éventualité les sommes livrées en acompte et, dans le cas où cela soit à l’initiative du vendeur, ce dernier devrait remettre à l’acheteur le double du montant reçu), (b) les arrhes confirmatoires (« arras confirmatorias »), qui impliquent que le contrat de vente est perfectionné, et que le montant versé est donc un acompte par rapport au prix de vente, et (c) les arrhes pénales (« arras penales »), qui pénalisent la partie qui se soustrait à son obligation d’achat ou de vente, mais qui ne lui permettent pas de se libérer de son obligation de réaliser l’opération de référence, à différence des arrhes pénitentielles.
Il est important de garder à l’esprit qu’en Catalogne, si rien n’est précisé, il sera considéré que les arrhes sont confirmatoires, et que leur versement implique donc un acompte par rapport au prix de vente.
Ce pacte d’arrhes est généralement souscrit sous seing privé auprès du propriétaire, bien qu’il puisse être formalisé par le biais d’un acte notarié. En ce sens, le Code civil de Catalogne réglemente expressément la remise des arrhes pénitentielles devant notaire. Et comme nouveauté, il est à noter que l’acte notarié de dépôt d’arrhes n’est pas sujet à imposition, dans la mesure où il bénéficie d’une bonification à 100% concernant l’Impôt sur les Actes Juridiques Documentés (AJD).
- Financement
Parfois, la phase suivante consistera à obtenir un financement pour l’achat du bien immobilier, par exemple en sollicitant un prêt hypothécaire. Celui-ci sera signé par écrit devant notaire, généralement de manière simultanée à l’octroiement de l’acte de vente.
Il est important de noter que le Code civil de Catalogne prévoit expressément la possibilité pour le potentiel acheteur de se retirer de la vente si le contrat prévoyait un financement total ou partiel du prix, dans le cas où l’établissement de crédit refuse ce financement, sauf accord contraire des parties.
- Acte notarié de vente
La dernière étape sera l’exécution de la vente, qui devra se faire par le biais de l’octroiement de l’acte notarié correspondant. Le choix du Notaire correspondra normalement à l’acheteur, dans la mesure où en Catalogne les frais notariés sont à sa charge, sauf pacte contraire. L’apport de certains documents sera ainsi nécessaire (documents qui devraient avoir fait l’objet de l’analyse juridique correspondant). Ainsi, Lors de l’achat de biens résidentiels, devront être fournis le certificat d’occupation, le certificat d’efficacité énergétique, le certificat sur l’état des dettes de la communauté, la taxe foncière (IBI), le rapport de l’inspection technique des bâtiments (ITE), obligatoire au cas où le bâtiment a plus de 45 ans. Si le bien immeuble est gravé par des charges (hypothèque ou autres), et la vente se réalise libre de charges, elles devront être préalablement annulées.
Aussi, il pourrait être souhaitable de renforcer la responsabilité du vendeur en prévoyant dans le document de vente un régime de manifestations et garanties spécifiques à sa charge, de sorte à ce qu’il doive indemniser l’acheteur en cas de contingences pouvant affecter l’immeuble.
Une fois l’acte notarié octroyé, ce qui impliquera la nécessité de liquider les taxes correspondantes tel que détaillé au paragraphe II suivant, il sera important de s’assurer qu’il est dûment inscrit au Registre de la propriété correspondant.
Finalement, il convient de noter que tous les étrangers doivent avoir un numéro d’identité d’étranger (NIE) pour effectuer grand nombre de procédures, y compris pour l’octroiement d’actes notariés. Il sera donc nécessaire de l’obtenir au préalable, ce qui peut être fait auprès du consulat ou de l’ambassade d’Espagne dans le pays de résidence ou en Espagne, sur rendez-vous, auprès de la Direction générale de la police, des bureaux d’immigration ou des commissariats de police de la province correspondante.
- Aspects fiscaux à tenir en compte
L’achat et la possession de biens immobiliers par des non-résidents fiscaux en Espagne sont l’occasion de comprendre la complexité de notre système fiscal aux yeux d’un investisseur non professionnel. Il faut ainsi garder à l’esprit l’accumulation des coûts fiscaux indirects, directs, locaux, etc. avant de faire cet investissement. Nous détaillons à continuation certains éléments devant être pris en compte par tout investisseur étranger afin de calculer le coût final du bien immobilier résidentiel objet d’intérêt.
- Acquisition
La fiscalité sur l’achat se concentre sur l’imposition indirecte par le biais de l’impôt sur le transfert de la propriété (ITP) ou de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) plus l’impôt sur les actes juridiques documentés (AJD).
L’imposition de l’une ou l’autre taxe dépendra de s’il s’agit de l’acquisition d’un bien d’occasion (ITP) ou d’un bien neuf qualifié de première livraison par le promoteur (TVA-AJD). L’ITP est un impôt transféré aux Communautés Autonomes (CCAA), et on peut trouver des taux d’imposition allant, par exemple, de 6% à Madrid à 10-11% en Catalogne. L’AJD est également un impôt transféré aux Communautés autonomes avec un taux d’imposition, par exemple, de 0,75% à Madrid à 1,5% en Catalogne. De son côté, la TVA s’élève à 10 %.
- Possession et vente
La possession d’une propriété résidentielle par un non-résident fiscal en Espagne est affectée par les impôts suivants :
– Impôt foncier : impôt local et annuel calculé sur la base de la valeur cadastrale (normalement inférieure à la valeur d’achat).
– Impôt sur le revenu des non-résidents :
La Convention pour éviter la double imposition (CDI) signée par l’Espagne et l’État de résidence de l’investisseur non-résident doit être analysée, si elle existe, afin de déterminer si l’Espagne est compétente pour imposer ledit bien, ce qui sera le cas habituel.
Si le bien est destiné à l’usage personnel du propriétaire tout au long de l’année civile, il faudra cotiser pour un revenu présumé calculé à 19% (pour les résidents de l’UE, l’Islande et la Norvège) ou 25% (reste des non-résidents) de 2 % ou 1,1 % de la valeur cadastrale de la propriété (en fonction de si cette valeur a été révisée il y a plus ou moins de 10 ans).
Si le bien est loué, les taxes seraient les suivantes :
- Résident de l’UE, Norvège ou Islande : 19% du revenu net (revenu moins charges déductibles dans les mêmes conditions que les résidents fiscaux en Espagne).
- Autres non-résidents : 24 % sur le revenu brut (aucune dépense ne peut être déduite).
Outre l’impôt sur le revenu des non-résidents, l’impôt sur la fortune peut être applicable dans certains cas. Dans ce sens, il conviendra d’analyser si l’Espagne a signé un CDI pour cet impôt afin de déterminer quel État est compétent. Enfin, il faut indiquer qu’il existe une exonération minimale de 700 000 euros, de sorte qu’il n’y a d’obligation de contribuer à cet impôt que si la valeur du patrimoine net de dettes dépasse ce montant. Dans ce cas, le taux d’imposition serait compris entre 0,2% et 3,5%.
En ce qui concerne le transfert futur de la propriété, si des plus-values ont été générées lors de la vente, elles doivent être imposées par le biais des impôts suivants :
– Impôt sur la plus-value des terrains urbains : impôt communal.
– Impôt sur le revenu des non-résidents : taux d’imposition de 19%.
En relation avec ce qui précède, à Prime Legal Abogados nous disposons de professionnels experts dans le conseil en matière d’acquisition de biens immobiliers en Espagne, que ce soit sous la perspective légale ou fiscale, qui pourraient également agir de façon dûment coordonnée à travers notre French Desk au cas nécessaire afin de donner à nos clients francophones non seulement le meilleur service possible mais aussi le plus adapté à ses besoins particuliers. N’hésitez pas à nous contacter.
Daniel Paes Julian, associé responsable du département de droit commercial et du French Desk, avec la collaboration de Raquel Aguilera Pascual, associée responsable du département immobilier, et de Sergio Crespo Minguillón, associé responsable du département de droit fiscal. Barcelone, le 15 Février 2023